Adapter son alimentation selon son terrain

Un des aspects de la médecine chinoise qui a tout de suite raisonné en moi, c’est qu’elle insiste sur la particularité de chacun. On ne peut pas toujours faire de généralité. Un conseil n’est pas toujours applicable pour tous. Selon le terrain de chacun, la médecine chinoise va justement chercher à proposer des conseils personnalisés, adaptés au cas particulier d’une personne.

En occident, on a tendance à réfléchir à partir des statistiques, et des moyennes, au lieu d’adapter aux besoins de chacun. On donne des recommandations pour corps un standard en bonne santé, alors que nous présentons tous plus ou moins des déséquilibres nécessitant des conseils personnalisés.

Par exemple: « il est mieux de manger cru ». Si les légumes, lorsqu’ils sont crus, contiennent effectivement plus de vitamines et de nutriments, ils nécessitent, pour pouvoir en bénéficier, un système digestif opérationnel et efficace. Dans le cas contraire, manger cru, et froid par la même occasion, va fatiguer encore plus le système digestif (on parle de la Rate/Estomac en MTC). Sur le long terme, cela va avoir tendance à éteindre le feu digestif de la Rate (dont une des fonctions est de réchauffer les aliments à la température de corps – 37°! – pour permettre la digestion). Cela peut entraîner des ballonnements, des selles molles, voire de la diarrhée, puisque la transformation des aliments ne se fera pas correctement. Les vitamines et nutriments ne seront pas bien absorbés. Et ce, même si ce sont des produits locaux, bio et tout ce que vous voulez. C’est d’ailleurs pour ça que la cuisson au « wok » est très utilisée en Asie: les aliments sont cuits et chauds à l’extérieur, mais encore crus à l’intérieur !

En pensant manger sainement, j’ai moi-même abîmé ma Rate en mangeant principalement des salades composées froides pendant plusieurs années, notamment pendant plusieurs hivers à Montréal ! Grosse erreur que je tente de réparer aujourd’hui.

On va donc adapter son alimentation en privilégiant des légumes cuits et chauds, afin d’aider la Rate à réchauffer le bol alimentaire.

Par ailleurs, la sur-information nous inonde d’injonctions, parfois contradictoires (pour ou contre les produits laitiers ? Pour ou contre la viande?), que nous appliquons sans vraiment comprendre les tenants et aboutissants. Je ferai un article prochainement sur l’importance de ne pas confondre « bon pour l’environnement », et « bon pour notre santé ».

Il est important d’une part de reprendre le pouvoir sur sa santé, en comprenant son corps, ses signaux d’alarme, et de faire appel à des praticiens formés qui peuvent nous orienter.

C’est la raison pour laquelle il me tient à cœur d’expliquer à mes patients durant les consultations le traitement que je mets en place afin de leur permettre de comprendre la cohérence de mes actions. Je donne également des conseils diététiques adaptés à chaque patient pour leur permettre d’être acteur de leur santé au quotidien.

Les grands principes alimentaires de la médecine chinoise valables pour tous

La médecine chinoise identifie quelques grands principes qui restent pertinents pour tous.

L’alimentation est la première source du Qi (de l’énergie). La qualité des aliments, mais aussi la manière de se nourrir sont importants pour produire un Qi de qualité. En médecine chinoise, c’est la Rate qui est responsable de la fonction de la digestion qui nécessite beaucoup d’énergie.

Il ne s’agit pas ici de manger « sain », « bio » ou d’éviter de grossir. Avant même de parler de la nourriture, bien manger, pour la médecine chinoise signifie avant tout plusieurs bonnes habitudes :

1. Manger à des horaires fixes

En effet, le corps aime la ponctualité, les habitudes, et la salive sécrétée au moment des repas diffère de celle sécrétée aux autres moments de la journée. Cette salive particulière aide spécifiquement à la digestion des aliments. Manger à des horaires différents chaque jour pénalise de ce fait la digestion.

2. Bien mâcher les aliments

La médecine chinoise préconise de mâcher au minimum 20 fois chaque bouchée. Mâcher permet de générer plus de salive, et donc d’augmenter la capacité de digestion. Cela implique qu’il faut accorder le temps nécessaire à chaque repas. Un repas pris « à la va vite » sans prendre le temps de bien mâcher débouchera souvent sur une mauvaise digestion.

3. Manger en conscience

Chaque repas doit être pris dans le calme, sans agitation ni source externe de déconcentration, comme la télé ou l’ordinateur. Sentir, puis goûter chaque aliment, apprécier les saveurs, les textures, la température etc. Manger est une activité en soi qui nécessite une attention bien particulière afin de préparer le corps à la digestion.

4. Manger tôt et léger le soir

Dîner au moins 3h avant le coucher et cuisiner des aliments faciles à digérer (soupe, purée par exemple, pas trop gras) permet de favoriser un bon sommeil. En effet, il est important de garder en tête que la digestion est une des activités les plus énergivores du corps humain. Le sommeil ne peut pas être de qualité si le corps travaille à la digestion en même temps. Par ailleurs, le corps demande souvent un temps de repos après un repas, car le corps n’a pas suffisamment d’énergie pour à la fois digérer et réaliser en même temps une activité. En cas de gros coup de pompe après le déjeuner, cela signifie que le système digestif est affaibli et nécessite d’être renforcé.

5. Des aliments à haute valeur nutritive

La qualité des aliments est au centre d’une bonne alimentation. Mais qu’est ce que cela signifie ?
Les aliments de qualités sont des aliments de saison, qui sont murs et qui ont poussé de manière naturelle grâce au soleil pendant une durée suffisante. C’est le soleil qui transmet le Qi aux aliments et qui leur donne leur valeur nutritive. Selon la MTC, l’alimentation doit essentiellement consister à se nourrir d’aliments (fruits, légumes) frais, non congelés et non transformés. Les aliments congelés, transformés (industriels), ou réchauffés au micro-onde perdent une partie de leur Qi, et ont une valeur nutritive moindre. Ils ne nourrissent pas vraiment le corps, et l’estomac est comblé par un leurre qui n’apportent plus grand-chose au corps à part des calories.

6. S’alimenter de saison

Les aliments (fruits, légumes) de saison sont propices à renforcer l’organe correspondant à la saison, et donc d’entretenir au cours de l’année chaque organe au moment approprié. La diététique chinoise est un des piliers fondamentaux de la médecine chinoise et nécessite un article à elle-même. Elle est basée sur la théorie des 5 éléments.

Chaque saison est reliée à un élément, à une couleur, à une saveur et à un organe que l’on peut soutenir grâce à l’alimentation. La thématique sera abordée plus en détail dans l’article sur le respect des cycles naturels.

7. Entretenir l’énergie de la Rate

En médecine chinoise, la Rate est l’organe principal du système digestif. Elle est lésée par l’excès de sucre, de gras, de produits laitiers, d’aliments froids et crus. Comme nous l’avons vu plus haut, il est donc conseillé de manger chaud et cuit, et d’éviter de consommer trop d’aliments sucrés, gras ou frits, ou de produits laitiers (principalement lait et yaourts). Tout ce qui est froid et sort du frigo en fin de repas n’est pas idéal (compote, yaourt végétal, glace) car cela va refroidir le bol alimentaire. Cela va demander 2 fois plus de travail à la Rate pour le réchauffer, et donc la fatiguer sur le long terme. On peut aussi aider la Rate à réchauffer le bol alimentaire par la prise d’une tisane chaude après le repas. Entretenir sa Rate au quotidien permet de garder un système digestif optimal, de transformer les aliments correctement, et de ce fait d’améliorer la qualité de son sang et de son énergie.

8. Manger à 80 % de satiété

La médecine chinoise préconise de s’arrêter de manger lorsqu’on atteint 80 % de sensation de satiété. Le corps met environ 20mn à identifier qu’il a atteint son quota de nourriture. Si on se nourrit jusqu’à n’avoir plus faim, alors on a déjà trop mangé, ce qui alourdit le système digestif inutilement. Il est donc sain d’avoir encore un peu faim à la fin d’un repas.

9. Se faire plaisir !

La médecine chinoise reconnaît l’importance de se faire plaisir et d’éviter les trop grandes frustrations, notamment alimentaires. Si on peut respecter ces grands principes diététiques la plupart du temps, on peut aussi s’octroyer un petit plaisir de temps en temps. Une trop grande frustration est nocive pour la santé sur le long terme. J’aborderai ce sujet dans l’article « Bien gérer ses émotion ».

10. Bien manger, et aussi bien boire !

Il est aussi question de bien boire – de l’eau (pure). En effet, l’eau, si elle est essentielle à la vie, a une fonction diurétique et aide à éliminer les toxines. Elle sert également à alimenter le sang et les liquides organiques qui nourrissent les tissus, tels que les tendons, la peau, et alimentent le système lymphatique. Il est donc important de bien s’hydrater au quotidien.

En revanche, il peut être, dans certains cas, délétère de boire trop d’eau, car cela peut fatiguer les reins en les sur-sollicitant. Il est également déconseillé de boire pendant les repas car cela va noyer le bol alimentaire et empêcher une bonne absorption des aliments. Il n’en reste pas moins qu’il est conseillé de boire environ 1,5L d’eau dans une journée.

La médecine chinoise conseille de boire quand on a soif, et non de trop se forcer à boire, car elle estime que le corps demande ce dont il a besoin, bien que cela soit parfois pathologique.

Par exemple, lorsque la Rate est affaiblie, sa capacité à gérer de l’humidité (ici l’apport en eau) est réduite. Les liquides ne sont pas transformés correctement, et sont soit stockés par le corps, soit envoyés directement à la Vessie sans que cela ne permette un réel processus d’épuration. Dans les deux cas, on peut présenter une soif importante, mais qui n’est pas étanchée par le fait de boire. Et pour cause, l’eau n’est pas redistribuée correctement dans le corps, et il en résulte une sécheresse notamment au niveau de la bouche. Boire plus ne va faire qu’inonder la Rate. L’eau sera stockée dans le corps, ce qui peut générer de l’humidité pathogène, comme par exemple de la rétention d’eau, des glaires, une sensation de lourdeur du corps, une brume cérébrale ou des œdèmes. En pensant bien faire, on aggrave le problème au lieu de le résoudre. On conseillera d’ailleurs donc à ces personnes de réduire leur apport hydrique pendant un temps pour éviter d’affaiblir encore plus la Rate, ou au moins de boire par petites gorgées, plus assimilables par l’organisme. Le praticien, lui, va aller tonifier la Rate, c’est à dire lui redonner l’énergie nécessaire pour lui permettre de traiter correctement l’humidité.

Entretenir sa vitalité, c’est d’abord prendre soin de son alimentation

Si l’alimentation (aliments et boisson) est essentielle pour notre santé, il est aujourd’hui difficile de bien s’alimenter dans notre quotidien de la vie moderne, en grande partie à cause du manque de temps, des mauvaises habitudes, de l’abondance des produits transformés et de l’addiction au sucre, sans parler de l’appauvrissement des sols qui ne permettent plus de cultiver des fruits et des légumes avec une qualité nutritive aussi élevée qu’avant, même locaux ou bio.

Pour entretenir sa santé, il est important d’être vigilant sur son alimentation, de favoriser sa Rate au maximum. Être à l’écoute de son corps permet d’identifier les signes de déséquilibres nécessitant la modification de ses habitudes alimentaires, et éventuellement une séance de médecine chinoise afin de rééquilibrer son système digestif et d’obtenir des conseils diététiques appropriés.

N’hésitez pas à prendre RDV pour une consultation !